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9 juillet 2013 2 09 /07 /juillet /2013 15:48

8h04 45 secondes la rue Batavia tire à sa fin je vais emprunter la rue Messine, certainement la plus longue de mon périple matinal. Quand j'entre j'ai l'impression d'être face à une immensité, un long fil se déroule à l’horizon devant mes yeux. Je me souviens les premières fois que je l'ai prise m'être dit : non ce n'est pas possible je ne vais jamais en sortir mais malgré tout je m'y engouffrais dans le secret espoir de m'y perdre. Cette rue semble dessiner deux mondes distincts entre sa rive droite et sa rive gauche. J'ai mes sens aux aguets dès que mon pied foule son pavé, agrumes, salins, amertume...toutes les odeurs viennent se frotter à moi et je sens alors toute la chaleur et le caractère d'antan, ahhhh.

J'entre donc et je suis entouré de jolis immeubles colorés, jaune, rouge terre, bleu, les volets suivent aussi la cadence. La musique continue avec l'arrivée des premiers commerces et jadis vient frapper à la porte avec en plein cœur de ville dans une rue piétonne et commerçante, une menuiserie tout de bois vêtue et comme voisin un serrurier, ils se font la parlote par leur devanture alambiquée.

Arrive le fleuriste, le buraliste, l'épicier tout trois faisant front, il est 8h05, face à la bouquinerie. Ces trois là ne feront jamais le poids face au charme de cette petite boutique, j'y suis passé maintes et maintes fois avant d'y entrer et de me laisser happer par les lieux. Des petites marches, des recoins, des plates-formes, des colonnes, des voûtes, de la pierre blanche, des livres en haut, en bas, à gauche, à droite, ici respire l'amour du livre peut-être même avant celui de la littérature.

 

Donc j'ai choisi de vous raconter ce 8h05, j'aurais pu choisir celui de mes off où je suis encore prisonnier de mon lit dans la fraîcheur de mes draps, de mes murs, de cet appartement vide. Oui je trouve depuis peu que mon lieu de vie en est dépourvue. Tout me semble rigide, triste, pathétique, terne. Je pourrais vous sortir tout un tas de termes dans la continuité de mon nouvel état d'esprit depuis que je trouve mon appartement vide de sens, depuis que j'ai découvert mon 8h05 et que ma semaine à 8h05 à plus de saveur que tout un dimanche loin de lui, loin de ça, loin de tout.

 

Je me suis demandé pourquoi ce chemin, me mettait d'entrain, pourquoi le moral revenait, j'avais la pèche, c'est bête à dire je sais mais c'était le cas, j'étais plein d'énergie et pas de l'excitation compliquée à canaliser mais bien de la bonne énergie positive, calme, apaisé. J'ai refait maintes fois, le soir dans les murs assombris de mon appartement, le chemin du matin pour comprendre. J'ai repris chaque rue, ruelle, avenue, détails, façades, tout a été passé au crible pour saisir. Mais il fallait aussi que je touche le moment précis où la béatitude, car le terme est significatif, me touchait. Et après une analyse chaque matin, avec une prise de conscience de chacun de mes pas, quel bonheur de prendre le temps le matin de savourer chaque pas. Qu'il prenne sens, même si ce n'est justement qu'il n'en n'a pas.

 

Puis un énième matin, le ciel était un peu gris, arrivé dans la rue Messine, je vis et remarquais que derrière chaque vitrine se trouvait quelqu'un. Etrange, ils me regardaient tous passer avec un drôle d'air. Je me suis dit, c'est une coïncidence qu'ils soient tous là derrière leur vitrine, à cette heure-ci, ils attendent peut-être le facteur. Le lendemain décision était prise de passer un peu avant, à 8h00. À 8h00 personne ne se trouvait là, je les voyais s’affairer dans l’installation de leurs rayons. Alors je réduisis le temps 8h01, 2 et 3 et 4...Chaque fois que je réduisais le temps je les voyais petit à petit se rapprocher de la vitrine, je me faisais la sensation de tenir dans les mains un flip book contant la vie d'une ruelle d'un autre temps, ou d'une autre dimension peut-être un peu. Et en passant à 8h04 je surpris des regards pleins de surprise, de gène, d'être démasqué. Alors il semblerait que ce soit bien moi que le matin ils attendent à l'abri derrière leur mur de verre. Nous avons un commun, nous croisons nos chemins, le lien du 8h05, mon 8h05 contribue au leur mais comment ?

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